Tout au long de sa carrière, Pierre Soulages poursuit une quête technique et formelle autour de la singularité du noir pour exprimer son "autorité, sa gravité, son évidence et sa radicalité". Ce cheminement débute dans les années 1940 avec ses premières expérimentations au "brou de noix", une teinture pour bois qui lui permet d'explorer l'intensité, la chaleur et les transparences des noirs. Novateurs, les brou sur papier détonnent dans le paysage pictural de l’après-guerre. Vingt ans plus tard, il y revient en utilisant ce mélange de poudres de couleur. Ces œuvres au brou de noix, déclinées en mille sept cents artefacts sont peintes par Soulage pendant seulement 7 ans entre le 11 novembre 1970 et le 15 octobre 1977 faisant de cette période, une des plus convoitées. Dédicacé à Georges Fall, éditeur d’art renommé qui travailla à de maintes reprises avec Soulage, notre œuvre appartient à cette très recherchée série des brou de noix des années 1970. Constituée de formes dressées à la verticale et à l'horizontale par des coups de pinceaux épais, elle incarne les recherches de l’artiste à cette époque. La fluidité de cette matière, sa teinte foncée qui exalte, par contraste, le blanc du papier annonce déjà la quête de lumière de Soulage, ses noirs et blancs épurés. Le brou de noix s’éclaire ici de transparences aléatoires. Armé d’une large brosse, Soulages l’utilise pour dresser une construction solide et hiératique.