Dès les années 1850 et jusqu’aux dernières années de son activité, les figures de nues sont au cœur des préoccupations artistiques d’Edgar Degas. Pour rompre avec la tradition du modèle assis ou couché dans une pose académique, Degas choisit de représenter des femmes nues, à leur toilette, comme « surprises à leur insu ».
"Les Baigneuses" illustre parfaitement ce nouveau mode de représentation. Dans ce dessin, Degas représente une scène intime où deux femmes s’adonnent à leur toilette quotidienne. L’une est vue de face, la tête légèrement tournée à droite et le bras levé tandis que l’autre est assise sur le rebord d’une baignoire. Particulièrement attiré par le mouvement, il met l’accent sur le geste lui-même en s’attardant essentiellement sur le tracé du corps des deux jeunes femmes. Les coups de crayons rapides et ininterrompus lui permettent de marquer l’impulsion et la prolongation du mouvement. Degas ne s’attarde pas sur l’expression de leur visage ou sur l’identité des deux jeunes femmes mais sur leurs positions dans l’espace. Au fur et à mesure qu’il construit son dessin, il ajoute et superpose la matière en faisant fusionner la charge de craie avec le fusain afin d’alterner les contrastes d’ombres et de lumière. Par un réseau complexe de hachures et de stries verticales et horizontales, les deux médiums construisent les figures dans leurs épaisseurs charnelles. Le regard de Degas sur ces deux femmes n’est ni intrusif ni voyeuriste. Il s’apparente plutôt à une expérience visuelle permettant l’étude anatomiques des corps, de la forme et du mouvement.